Samedi11novembre

Onzième journée de notre trek qui en compte 15 ! Nous sommes aussi à la veille de notre passage au col du Thorong La ! La difficulté ultime se passera donc aujourd'hui. Si nous atteignons le camp de base du Thorong La à 4840 mètres sans douleurs à la tête, alors nous serons pratiquement certains de passer l'altitude maximale prévue, soient 5416 mètres !

Il va donc falloir gravir les pentes encore et encore pour s'approcher des 5000 mètres.

Nous sommes dans les températures négatives, l'eau gelée des écuelles est là pour nous le rappeler...

Nous avançons laissant derrière nous l'Annapurna III.

Les cascades se figent au rythme des stalagtites.

Petit arrêt à 4360 mètres où la marchande ambulante devenue sédentaire vend toutes sortes de cochonneries.  

Comme pour aller au lac Tilicho, les sentiers se rétrécissent sur les pentes glissantes des montagnes dégarnies.

4500 mètres d'altitude. Il nous reste un seul kilomètre pour rejoindre le camp de base. Autant dire que nous y sommes presque... sauf qu'il va falloir dans le même temps nous élever de presque 400 mètres. La pente sera donc raide et avec nos 10 jours de rando dans les pattes, l'effort sera intense !  

Malgré son apparente hésitation, il refusera obstinément d'offrir ses services... Il faudra donc y aller avec nos propres jambes...  

Pas moyen pour nous de faillir quand Man Bahadur avec notre sac sur le dos, avance sans broncher, bien que pour la première fois, je le sens aller puiser dans ses réserves.

Enfin j'arrive au bout, me retourne et devine déjà que le paysage ne va pas nous décevoir. D'ici, nous aurons une belle vue sur les toits du monde...  

25. C'est le numéro de notre chambre où nous passerons cette nuit à 4840 mètres d'altitude !

Et alors que le Soleil rayonne tout ce qu'il peut de photons...

...arrivent enfin mes compagnons de voyage. He oui, durant ce trek, on peut dire que j'étais en bonne forme par rapport aux autres années. Ni rhumes ou autres mal de dos pour venir entraver ma marche dans les sommets. A la bonheur !

Déjeuner mérité autour d'un dal bhat, de quelques morceaux de poulet perdu dans ses légumes et d'un "bon" café.  

Comme si cela ne nous suffisait pas, un petit sommet nous tend les bras pour ajouter une petite ascension supplémentaire à la journée.

De ce piton, la vue se dégage sur les sommets qui nous entourent.

A gauche, le sommet Chulu East. En face, l'Annapurna III, et juste à côté, le Gangapurna.

Tout en bas, les bâtiments où nous commencions notre dernier kilomètre.

Un lhapsa, le nom tibétain des monticules de cailloux, termine le pic.

Un autre lhapsa plus modeste, défie pourtant les 7455 mètres du Gangapurna !  

Dans le prolongement du petit sommet que nous avons gravit, un fin piton rocheux se finit en précipice. Entre les deux, des cordes de drapeaux à prières se laissent porter par le vent.

Je descends donc de mon petit sommet tout en vérifiant que Chistophe et Christelle sont toujours sur leurs deux jambes... 

Puis je me décide à rejoindre autant que possible l'extrémité de ce piton rocheux, afin de me mesurer à ces hauteurs minérales qui se jouent du vide qui les entoure...

Mon chemin passe par cette jeune touriste au parka jaune qui semble rechercher la totale communion avec dame nature. Mais, il en est tout autre (quoique) puisqu'elle joue de la guimbarde dans une tonalité n'étant pas sans rappeler quelques musiques tibétaines.

Au fur et à mesure de mes pas prudents, le piton rocheux se métamorphose en crête de plus en plus fine... Mais le graal approche, et ceux qui en reviennent me font comprendre sans équivoque qu'il ne faut pas encore rebrousser chemin...

Le trône de pierre est déjà occupé. Le royaume des Annapurnas se gouverne-t-il d'ici ? Ce roi au bonnet rouge semble en tout cas satisfait de pouvoir embraser d'un seul regard tout son empire.

Je continue d'avancer. Vais-je détroner un souverain si tranquille ?... La roche est frillable et les débrits qui tombent dans le vide à chacun de mes pas, font reprendre à mon cerveau le contrôle de la situation et je décide de m'immobiliser ici, à un endroit où, finalement, l'adrénaline ne viendra pas perturber la superbe vision qui s'offre à moi...  

Retour au camp. Le soleil ne tarde pas à se dissimuler derrière les quelques 8000 mètres de granite qui nous entrourent, nous plongeant du même coup dans leurs ombres.

Des tétraogalles de l'Himalaya (Tetraogallus himalayensis) en profitent pour sortir prendre un petit air frais...

Fin de soirée dans la salle commune autour d'un repas chaud et quelques jeux de cartes. Nous ne trainons pas car demain est le grand jour... Le départ est prévu à 5 heures, pour la dernière ascension qui nous fera franchir le col du Thorong La à 5416 mètres d'altitude...

Dimanche12novembre

4h00. Il est l'heure de s'extirper de son duvet. 4h30. Rapide petit déjeuner. 4h58. Rapide photo de la constellation d'Orion qui ne nous a pas attendu pour commencer son ascension...

6h00. Déjà 1 heure que nous marchons à la lumière de nos lampes frontales. Nous sommes 40 mètres au-dessus des 5000 mètres. Une petite pause (de 5 minutes) s'impose.

Et c'est reparti.

Le tour des Annapurnas se fait aussi en vélo. Bien apréciable dans ses descentes, plus encombrant dans ses montées...  

Je marche en solitaire mais pas tant que ça car Narayan se trouve juste derrière moi ! Les autres ne vont sûrement pas tarder.

Il ne fait pas chaud alors je reprends la route sans attendre, histoire de ne pas refroidir mes petits muscles...

7h00. Le soleil est déjà bien haut dans le ciel, et nous pas encore assez haut. Je suis à 5336 mètres, le col n'est sûrement pas loin !

Les derniers mètres, je les ferai avec Man Bahadou. Au bout du chemin, 12 jours que nous l'attendons, le Thorong La est là !

Des milliers de drapeaux à prières marquent le passage du col du Thorong La, faisant face au sommet du Khatung Kang.

Quand on marche onze jours avec en ligne de mire un simple passage coincé entre 2 montagnes, l'émotion se dissimule. Puis elle surgit juste au bon moment, quand nous sommes au zénith du parcours ! Ou plus exactement à 5416 mètres !    Alors, forcément, on est heureux d'immortaliser ce moment avec tous ses compagnons de voyage devant le trophée officiel !  

Sur place, un tout petit refuge. De quoi se mettre à l'abri si nécessaire.

Il nous faudra 1h30 sur place pour savourer le moment. Mais la journée ne se termine évidemment pas ici. Il n'est que 8h30 et juste derrière le col, nous attendent encore plusieurs heures de marche, et pas les plus faciles pour moi car il faudra descendre continuellement avec un dénivelé de 1700 mètres en une seule journée...

Le paysage va de nouveau changer. Nous laissons derrière nous le district de Manang, pour rentrer dans celui du Mustang et ses grands espaces.

4 heures après notre passage du col, nous avons en vue le petit village de Ranipauwa où nous passerons la nuit.

Au loin, le superbe sommet du Dhaulagiri et ses 8167 mètres !

Le village résiste encore à la bitumisation et accepte tout juste le passage de l'électricité.  

La vue de notre chambre dans l'hôtel Potala Guesthouse.